Attention : Le jeûne n’est pas une technique anodine. Elle nécessite une préparation ainsi qu’un suivi global pendant toute la durée de celui-ci
Que ce soit dans les journaux, les magazines santé, beauté, mode, féminins ou masculins, le jeûne a le vent en poupe. Qu’il soit thérapeutique ou religieux, le jeûne est pratiqué par l’Homme depuis la nuit des temps. Quand certains tirent la sonnette d’alarme et crient au danger en mettant en avant d’éventuelles carences et une importante perte de poids avec effet yoyo, d’autres en font l’éloge en listant les nombreux bienfaits.
Alors le jeûne est il bon ou mauvais ?
Si en France une grande partie du corps médical ne croit guère aux effets thérapeutiques du jeûne, dans d’autres pays il est une pratique courante. Chez nos voisins allemands, le jeûne est indiqué par exemple dans le traitement de l’arthrite et du diabète de type 2 et pratiqué dans plusieurs cliniques et fait même l’objet de remboursements par des assurances. En Russie d’illustres scientifiques comme Ivan Pavlov (prix nobel de psychologie ou médecine en 1904) ou Viktor Pashutin avaient étudié les mécanismes du jeûne chez l’animal à la fin du XIXème siècle. Dans les années 50 le psychiatre Yuri Nicolaev est le premier à expérimenter le jeûne sur l’Homme en psychiatrie. Opposé au gavage forcé de certains patients, le médecin va laisser quelques-uns de ses malades ne pas s’alimenter le temps qu’ils le désirent. Nicolaev observe alors des rétablissements spectaculaires. Aujourd’hui, l’institut de psychiatrie de Moscou a recours au jeûne dans la prise en charge de diverses maladies, des troubles obsessionnels compulsifs à la dépression en passant par les troubles cardiovasculaires ou encore digestifs. Un peu plus loin au Japon, le jeûne est pratiqué dans le cadre de psychothérapies dans plusieurs hôpitaux.
Le jeûne, reconnu pour ses bienfaits thérapeutiques par de nombreux scientifiques et thérapeutes, est l’une des plus anciennes méthodes d’auto-guérison. Cette méthode est même utilisée dans la nature par les animaux quand ils sont malades ou blessés et permet d’assainir le corps et l’esprit et de se reconcentrer sur l’essentiel.
Qui peut jeûner ?
À part les enfants, les femmes enceintes, les personnes épuisées avec une vitalité dans les chaussettes ou avec des carences aigues en minéraux, les malades sous médication chimique lourde, tout le monde peut jeûner. Oui même toi qui te dis « ah non mais moi je suis incapable de jeûner. Je peux pas passer une journée sans manger. »
Par contre, prudence ! On ne fait pas un jeûne comme on va faire une séance d’abdo-fessier. Un jeûne ça se prépare et ça s’encadre.
Comment ça se passe ?
Tout d’abord, il faut savoir que l’organisme humain, avec un apport en eau adéquat, peut survivre en jeûnant entre 70 et 80 jours. Si vous pouvez jeûner sans risque chez vous pendant une journée, le jeûne thérapeutique, qui va durait une semaine (ou plus, pour les habitués de la pratique) demande une petite préparation et doit être accompagné. Il existe de nombreux centres de jeûne encadrés par des professionnels de santé qui seront parfait pour jeûner en toute sécurité.
Préparation : La semaine qui précède le jeûne, il est important de réduire peu à peu son alimentation. Manger moins permet de diminuer la fonction d’assimilation de l’organisme afin qu’il puisse se consacrer à l’élimination. Alors on oublie le burger et la tartiflette et on va commencer par éliminer ce qui est lent à digérer et qui surcharge le système digestif et la fonction d’élimination.
Le premier jour, on va supprimer les viandes et les poissons ainsi que l’alcool. Puis le jour suivant les œufs et les laitages et le troisième jour les féculents et enfin les céréales. Les jours qui restent on s’alimente que de fruits et de légumes crus et/ou cuits et le dernier jour, la veille de votre jeûne, ne prenez que des jus de fruits ou de légumes (Pas de nourriture solide). Les fumeurs devront ralentir voir mieux, stopper leur consommation de tabac.
En parallèle, il est important d’évacuer les matières (oui c’est aussi comme ça qu’on dit « caca ») de son intestin par une purge et des lavements doux.
La purge “expéditive” : à base de chlorure de magnésium, sulfate de magnésium ou sel de nigari : on avale 1 sachet de 30 à 40 g dilué dans une bouteille d’eau d’un demi litre en 2 prises espacées de 30 min. Souvent, l’effet est quasi immédiat, il faut se rendre aux toilettes très rapidement.
Les lavements doux : ils consistent à injecter dans le côlon un litre à un litre et demi d’eau tiède à l’aide d’un bock à lavement et de sa petite canule.
On peut aussi boire des tisanes diurétiques (queue de cerise, menthe, verveine, busserole, prêle, frêne…).
Quand l’intestin est bien nettoyé et qu’on a fait notre « descente alimentaire », alors commence la seconde phase.
Aller direction le centre de jeûne.
Que se passe t’il dans mon corps quand je jeûne ?
Quand il est privé d’aliments pendant plusieurs jours, voire même plusieurs semaines, notre corps va faire face à ce manque de carburant en puisant dans les ressources dont il dispose. Il va passer par 3 phases :
Première phase : Dans les premières heures du jeûne, l’organisme va utiliser le glucose disponible directement dans le sang. Quand il n’y a plus de sucre disponible dans nos veines, le glucagon va être sécrété par le pancréas, pour mobiliser le glycogène (forme de réserve du glucose) qui est stocké dans le foie. Cette phase dure environ 12 à 24 heures selon les réserves accumulées et l’activité.
Deuxième phase : les ressources de glucose étant épuisées, l’organisme va alors mettre en route un mécanisme adaptatif : la néoglucogénèse. Il s’agit de la synthèse de glucose dans le foie, à partir des acides aminés issus de l’hydrolyse des protéines musculaires ou à partir des acides gras du tissu adipeux. Cette phase ne peut pas être maintenue longtemps car la fonte protéique serait trop rapide et incompatible avec une survie prolongée. L’évolution a donc sélectionné une autre stratégie pour prendre le relais de la néoglucogénèse. Après une période de deux à quatre jours, l’organisme va privilégier progressivement une voie métabolique qui se caractérise par une dégradation protéique infime permettant une survie prolongée. Pas bête la mouette !
Troisième phase : Elle commence entre le quatrième et le cinquième jour de jeûne et pourra durer plusieurs semaines. L’organisme va utiliser ses réserves de graisses stockées dans le tissu adipeux, et les transformer dans le foie en corps cétoniques; c’est la cétogénèse. Trois molécules vont être synthétisées: le β-hydroxybutyrate (en majorité), l’acétoacétate puis l’acétone (volatil il sera éliminé par les poumons si il est en excès, ce qui donne une vraie haleine de chacal !).
Au cours de ces différentes phases mais surtout les premiers jours de jeûne, du fait que le corps fait son « grand nettoyage », certains symptômes peuvent apparaître quand les toxines sont délogées et circulent dans le sang avant d’être évacuées. Les symptômes les plus classiques sont : les nausées, les maux de tête, la langue pâteuse et la mauvaise haleine, les palpitations cardiaques… mais aussi les insomnies, les troubles de l’humeur, l’asthénie, la diarrhée, les douleurs aux rein et au foie, la frilosité, l’hypersensibilité … Qui a dit que le jeûne était une petite balade de santé version « colchiques dans les près » ? Mais rassurez-vous ces symptômes n’apparaissent ni tous en même temps ni chez tous le monde.
Les bienfaits du jeûne
Au début, difficile d’imaginer que l’on va prendre du plaisir à jeûner mais quand la période d’élimination est passée (généralement le 3ème ou 4ème jour), on commence a se sentir bien, à avoir une sensation de renouveau et un regain d’énergie vitale. En favorisant l’élimination de toutes les toxines de l’organisme, le jeûne se transforme en véritable détox.
Après deux ou trois jours de jeûne, la sensation de faim disparaît et nous entrons dans un état de contentement. Détaché du rythme classique « trois repas par jour » notre esprit se libère et l’on ressent de la sérénité. Il est important de rythmer les journées par des lectures, des activités manuelles ou des méditations, des randonnées afin d’occuper l’esprit.
Repos du ventre : Bien souvent malmené par une alimentation déséquilibrée et/ou trop riche, le système digestif prend quelques vacances grâce au jeûne. Le foie et les parois de l’intestin se régénèrent, le pancréas et l’estomac sont mis au repos et la flore intestinale se rééquilibre.
Miroir mon beau miroir : Les excès se traduisent souvent sur la peau par un surplus de sébum avec l’apparition de boutons, de cernes et un teint terne. En jeûnant, la production de sébum est réduite, les impuretés disparaissent, la peau se régénère et devient plus lisse (par contre si le jeûne est trop long et si on ne boit pas assez, il peut creuser les rides). La régénérescence du corps profite aussi aux cheveux, qui se retrouvent fortifiés ainsi qu’aux dents qui gagnent en blancheur.
À votre bon cœur : Une étude réalisée par les chercheurs de l’Intermountain Medical Center (Utah, USA) a démontré que le fait de jeûner réduit le taux de triglycérides, diminuant ainsi les risques de maladies cardiovasculaires. A l’instar des triglycérides, le cholestérol est réduit lors du jeûne, permettant ainsi de diminuer les problèmes d’hypertension artérielle.
Cool Raoul : Des scientifiques et des médecins russes, allemands et américains, ont montré que les personnes atteintes de dépression, qui pratiquent le jeûne retrouvent un esprit clair et positif à court terme, grâce aux changements hormonaux correspondants : hausse du cortisol le matin, de la dopamine dans la journée et de la sérotonine le soir, régulation de l’insuline et des hormones thyroïdiennes.
Un barrage au « crabe » ? : Une étude menée par le Dr Valter Longo publiée dans la revue Science Translational Medicine montre que de courtes périodes de jeûnes limitent la propagation de certains cancers chez la souris. Ainsi, associé à une chimiothérapie, il augmenterait l’efficacité du traitement en privant les cellules cancéreuses de leur substrat énergétique. Les cellules cancéreuses, qui sont des cellules anarchiques qui travaillent pour leur propre compte, sont affaiblis par le jeûne alors que les cellules saines, programmées par l’évolution pour la survie, sont elles renforcées. Ainsi, le jeûne permettrait donc aux cellules saines de mieux résister aux effets secondaires de la chimio.
La reprise alimentaire
Il est important de maîtriser la reprise alimentaire car si le lendemain du jeûne vous vous jetez sur le plateau de charcuterie / fromages et le verre de vin, vous allez en baver. La reprise doit toujours être progressive. Si le jeûne dure une semaine ou plus, la reprise doit s’étaler sur quatre ou cinq jours. L’estomac étant plus petit, l’envie de manger sera plus grande que vos capacités digestives. Si on mange trop, la reprise sera brutale et pourra entraîner des vomissements. Le plus important est de manger lentement et de bien mâcher chaque aliment. Les personnes qui gardent une mauvaise hygiène de vie entre les jeûnes verront les effets bénéfiques du jeûne disparaître très rapidement.
Attention : Le jeûne n’est pas une technique anodine. Elle nécessite une préparation ainsi qu’un suivi global pendant toute la durée de celui-ci
Où jeûner :
Les centres “Jeûne et randonnée” https://www.ffjr.com
Les centres “Jeûne et bien-être” https://jeune-bienetre.fr
Les cliniques Buchinger https://www.buchinger-wilhelmi.com/fr
Quelques livres :
Documentaire Arte :
Le jeûne, une nouvelle thérapie ?
Prenez votre santé en main 🙂
Noémie Vega
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